Bois et papier au Maroc : un secteur stratégique en mutation

Bois et papier au Maroc : un secteur stratégique en mutation

Dans un contexte où le Maroc cherche à renforcer sa souveraineté industrielle, la filière bois et papier opère en 2025 un virage décisif. Portée par une demande croissante en mobilier, une politique douanière plus ferme et des investissements ciblés, cette industrie longtemps marginale retrouve une place stratégique dans l’économie nationale. Cependant, entre fiscalité pénalisante, dépendance aux importations et déséquilibres concurrentiels, les défis restent nombreux pour construire une filière compétitive et intégrée.

Un secteur en mutation au cœur des enjeux industriels

Alors que le Maroc cherche à consolider sa souveraineté industrielle, la filière bois et papier se retrouve à la croisée des chemins. Elle fait face à une concurrence étrangère accrue. En parallèle, des acteurs marocains investissent massivement dans la transformation locale.

Avec un chiffre d’affaires global de 5,1 milliards de dirhams, le secteur ne représente que 0,5 % du total des 500 champions marocains. Néanmoins, il conserve une place stratégique dans l’économie nationale. Il alimente l’emballage, la construction, le mobilier et l’impression.

En 2025, treize entreprises figurent parmi les grandes sociétés marocaines du secteur. Cela reflète à la fois sa résilience et sa transformation. Plusieurs groupes industriels affichent une forte croissance.

Classement des acteurs les plus dynamiques

Comarbois reste le leader avec 852 millions de dirhams de chiffre d’affaires en 2024, en progression de 10,7 %. Robelbois suit avec +9 %, puis Gadimat qui affiche une hausse remarquable de 17,6 %. Ce dernier se distingue particulièrement dans les panneaux décoratifs.

Parmi les autres entreprises notables : Socoreg, Marocaine et Nordique des Bois, Riche Bois, SDK Wood, Les Emballages Marocains, Manufacture de Papiers et Fournitures et Société des Tôles et Bois.

Investissements industriels et modernisation

Parmi les faits marquants de l’année, CEMA Bois de l’Atlas a lancé un plan d’investissement de 150 millions de dirhams. Il vise trois objectifs : moderniser les équipements, renforcer la transformation locale, et intégrer davantage d’énergies renouvelables dans la production.

Ce mouvement accompagne la volonté nationale d’augmenter la valeur ajoutée locale. De plus, il contribue à réduire la dépendance aux importations.

Malgré des marges encore fragiles, la filière dispose d’un véritable potentiel de croissance. Par exemple, la valorisation des déchets bois, la production locale de carton et de papier recyclé et l’essor des usages biosourcés offrent de nouvelles opportunités.

Ainsi, dans une logique d’intégration industrielle, le bois et le papier deviennent un pilier de la souveraineté industrielle du Maroc.

MDF, fiscalité, quotas : la politique industrielle à l’épreuve

Nouveau droit de douane sur les panneaux MDF revêtus

Depuis le 15 avril 2025, un droit de douane de 1 dirham par kilo s’applique aux panneaux MDF décoratifs importés. Cette mesure vise à protéger la production nationale. Elle concerne les panneaux de fibres de bois recouverts de feuilles plastiques ou de papier mélaminé.

Un effet levier pour la production locale

Les effets de cette mesure sont déjà visibles. Plusieurs entreprises développent ou renforcent leur production locale de MDF mélaminé :

Cette implantation confirme l’attrait croissant du Maroc pour les fabricants de panneaux bois à l’échelle internationale.

Meuble en bois : un marché prometteur mais sous pression

Le marché marocain du mobilier en bois est estimé entre 15 et 20 milliards de dirhams. Il représente environ 30 000 emplois directs et indirects. Toutefois, 30 à 40 % du marché est encore accaparé par les importations. Celles-ci proviennent essentiellement de l’Union européenne, de la Turquie et de l’Asie.

Une fiscalité déséquilibrée

Le système fiscal actuel est critiqué par les industriels. En 2025, la taxe forestière est de 12 % sur les matières premières bois destinées à la fabrication locale. En revanche, les meubles finis importés ne sont taxés qu’à 6 %. Ce déséquilibre affaiblit la compétitivité des produits « Made in Morocco », alors même que la demande explose avec l’organisation de la CAN 2025 et de la Coupe du monde 2030.

La parole aux industriels

« La matière première coûte plus cher que le produit fini importé », déplore Othman Tazi, DG de Hospitality & Contract chez Richbond.
« Nous ne demandons pas un privilège, mais une équité fiscale », affirme Aymane Sami, président de l’AMIBA.

Quotas MDF : une protection critiquée

La mesure de sauvegarde sur les panneaux MDF instaurée en 2024 a principalement bénéficié à un seul producteur. Beaucoup d’industriels rencontrent désormais des ruptures de stock dès que les quotas douaniers sont atteints. Cela fragilise la continuité des chaînes de production.

Vers un nouveau modèle industriel bois au Maroc ?

Des leviers de croissance à mobiliser

Plusieurs leviers peuvent soutenir la transformation du secteur :

  • Valorisation des déchets bois et papier

  • Production locale de carton et papier recyclé

  • Développement des capacités MDF nationales

  • Harmonisation fiscale en faveur de l’industrie

Une stratégie alignée avec la souveraineté industrielle

Ces efforts s’inscrivent dans la stratégie nationale d’industrialisation. Elle vise à réduire le déficit commercial, augmenter la part des produits à forte valeur ajoutée locale, et remplacer les importations dans les secteurs clés comme l’ameublement ou le panneau bois.

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